Tout Petit Virus vs Grosse Cellule

Le meilleur allié du virus est sa victime.

Cet article, qui est destiné à un public curieux plutôt qu’à d’éminents spécialistes, essaye d’expliquer les relations entre le virus et sa cible, la cellule pulmonaire.
This article exists in English.

Les textes entre accolades { } sont des explications immédiates des mots qui précèdent.

Les combattants

Le SARS-CoV-2 est le virus à l’origine d’une grave maladie, la maladie à coronavirus 2019, la Covid-19. Ce virus est très petit, comme la plupart des autres virus. Mais comparé aux autres virus, il a un diamètre de 125 nanomètres {un nanomètre = un milliardième de mètre soit un millionième de millimètre} ce qui en fait un gros virus. Son image est très connue avec ses pointes qui forment une couronne ; il fait aussi penser aux mines marines.
C’est comme ça, une mine marine.

Sa cible préférée : les cellules épithéliales {cellules qui tapissent les alvéoles pulmonaires} du poumon. Une cellule mesure environ 25 µm {25 microns ou micromètres ; un micron = 1 millionième de mètre soit un millième de millimètre}

Son objectif : entrer dans la cellule et la modifier (ou modifier son programme) pour qu’elle fabrique des répliques.

En échelle de grandeur : si la cellule est un ballon officiel de football (22 cm de diamètre), le virus serait représenté par une tête d’épingle de 0.11 cm.

Cliquer sur le lien pour voir le schéma du virus

Cliquer sur le lien pour voir le schéma des cellules épithéliales

La bataille

Entraîné par un flux d’air ou de liquide ou par un déplacement de mucosités{Substance visqueuse, claire, sécrétée par certaines glandes}, le virus arrive au contact d’une cellule. C’est là que les pointes entrent en action ; elles ont la possibilité de s’allonger et de se rétracter. Elles s’allongent pour tâter la surface externe de la membrane de la cellule grâce aux molécules qui se trouvent à l’extrémité des pointes et aux molécules qui parsèment la surface de la membrane. La cellule est trompée par les pointes du virus qui se font passer pour de la nourriture.

Lorsqu’il y a correspondance entre les deux éléments, la pointe se fixe à la membrane et même très solidement et se contracte pour amener au contact les deux membranes.

La cellule met à la disposition du virus deux possibilités pour entrer :

  • une enzyme {accélérateur de réaction chimique} ACE2 qui se lie à l’enveloppe du virus, observée pour le SARS-CoV-2,
  • une protéase {une autre enzyme qui découpe et met à la poubelle le morceau de membrane} TMPRSS2 qui provoque la fusion des deux enveloppes.

Une fois un large trou creusé dans la membrane cellulaire, le virus pénètre dans le cytoplasme {tout ce qui se trouve à l’intérieur de l’enveloppe cellulaire à l’exclusion du noyau et éventuellement du nucléole} de la cellule. Les deux membranes fusionnent à ce moment, côté virus cela détruit l’enveloppe et libère la capside {seconde enveloppe qui enferme le programme du virus} dans le cytoplasme.

Là encore, c’est la cellule qui va faire le travail, la capside virale va être dissoute par les protéases de la cellule. Résultat, le génome {tout le matériel génétique, le programme, qui se trouve dans l’ARN} du virus se promène dans la cellule en toute liberté.

Tout le travail qui reste pour répliquer le virus va être accompli par la cellule qui, à la lecture du programme contenu dans l’ARN {acide ribonucléique longue chaîne de 4 molécules dont les combinaisons et le séquencement forment un programme}, va synthétiser tous les éléments pour reconstruire un virion {un virus presque complet comprenant la capside et son contenu}.

La capside va se déplacer vers la surface de la cellule et se mettre au contact de la membrane cellulaire ; le processus déchire la membrane avec une surface suffisante pour envelopper le virion qui est expulsé à l’extérieur où l’assemblage se termine pour donner un virus en bon état de marche qui va s’empresser de conquérir une autre cellule.

Et ?

Un virus de perdu, un virus de créer = match nul ! Et bien non, le programme contenu dans l’ARN injecté contient une instruction pour la cellule : une fois le processus de création d’un virion terminé, on reprend tout depuis le début. Ceci permet, à partir d’un virus d’en créer un grand nombre jusqu’à ce que … la cellule épuise ses ressources et voit sa membrane déchiquetée par plein de petits trous (d’où la mention au début de cet article de la grande différence de tailles entre le virus et la cellule).
La cellule meurt et pourrit sur place : petit virus a détruit la grosse cellule.

Réflexion sur une intervention humaine pour défaire le virus SARS-CoV-2

Lorsqu’on ne peut plus détruire le virus avant qu’il ne s’approche de sa cible – par exemple en l’attaquant avec du savon et du vinaigre de cidre qui vont détruire l’enveloppe ou du savon et de l’alcool qui vont détruire la capside – il ne reste plus grand chose à faire, si on écarte la possibilité de détruire la cellule cible. Il faut absolument empêcher l’accrochage entre le virus et la cellule. Une telle possibilité est théoriquement possible, comme le prouve cette publication :
Inhibition in vitro du coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère par la chloroquine
Résumé :
Nous rendons compte sur la chloroquine, une 4-amino-quinoléine, comme inhibiteur efficace de la réplication du coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère (SARS-CoV) in vitro. La chloroquine est un médicament cliniquement approuvé efficace contre le paludisme. Nous avons testé le phosphate de chloroquine pour son potentiel antiviral contre la cytopathicité induite par le SARS-CoV en culture cellulaire Vero E6. Les résultats indiquent que la CI50 de la chloroquine pour l’activité antivirale (8,8 ± 1,2 lM) était significativement inférieure à son activité cytostatique; CC50 (261,3 ± 14,5 lM), donnant un indice de sélectivité de 30. La CI50 de la chloroquine pour l’inhibition du SARS-CoV in vitro se rapproche des concentrations plasmatiques de chloroquine atteintes pendant le traitement du paludisme aigu. L’addition de chloroquine aux cultures infectées pourrait être retardée jusqu’à 5 heures après l’infection, sans baisse importante de l’activité antivirale. La chloroquine, un ancien médicament antipaludique, peut être envisagée pour une utilisation immédiate dans la prévention et le traitement des infections par le SARS-CoV.
2004 Elsevier Inc. Tous droits réservés.

Allez, encore une autre :
La chloroquine est un puissant inhibiteur de l’infection et de la propagation du coronavirus du SARS
Résumé :
Contexte: Le syndrome respiratoire aigu sévère (SARS) est causé par un coronavirus récemment découvert (SARS-CoV). Aucun traitement prophylactique ou post-exposition efficace n’est actuellement disponible.
Résultats :
Nous rapportons, cependant, que la chloroquine a de forts effets antiviraux sur l’infection par le SARS-CoV des cellules de primates. Ces effets inhibiteurs sont observés lorsque les cellules sont traitées avec le médicament avant ou après l’exposition au virus, suggérant à la fois un avantage prophylactique et thérapeutique. En plus des fonctions bien connues de la chloroquine telles que l’élévation du pH endosomal, le médicament semble interférer avec la glycosylation terminale du récepteur cellulaire, l’enzyme de conversion angiotensique 2. Cela peut influencer négativement la liaison aux récepteurs du virus et abroger l’infection, avec ramifications par l’élévation du pH vésiculaire, entraînant l’inhibition de l’infection et la propagation du SARS CoV à des concentrations cliniquement admissibles.
Conclusion :
La chloroquine est efficace pour prévenir la propagation du SARS CoV en culture cellulaire. Une inhibition favorable de la propagation du virus a été observée lorsque les cellules ont été traitées avec de la chloroquine avant ou après l’infection par le SARS CoV.
© 2005 Vincent et al; licensee BioMed Central Ltd.

Les autres possibilités sont l’immunisation acquise après une primo-infection (les virus sont si imprévisibles que l’effet peut exister ou pas, se produire immédiatement ou tardivement, durer longtemps ou s’estomper rapidement) et le vaccin (quelque mois ou plusieurs années, voir l’historique du toujours attendu vaccin du VIH). Études et recherches sont en cours à ce sujet.

Notes :

Pour les courageux : Apical Entry and Release of Severe Acute Respiratory Syndrome-Associated Coronavirus in Polarized Calu-3 Lung Epithelial Cells version ePub ou PDF en haut à droite.

Pour les fans du virion : une photo (non dédicacée) du virion

Pour ceux qui ont besoin d’un schéma : The life cycle of SARS-CoV

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